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La revue Europe publie dans son numéro 1123-1124 (nov-déc 2022) un cahier « Denis Guénoun », qui comprend des participations de Lire la suite

La revue Frictions (Théâtres / Ecritures), publie, dans son numéro 35 du 2ème trimestre 2022, un long entretien entre Michel Deutsch et moi, mené par Odile Quirot. Lire la suite

A la suite des précédents Ecrits théoriques de jeunesse, voici le texte d’une communication présentée au deuxième colloque de Cluny (2-5 avril 1970), intitulé « Littérature et idéologies ».

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18.04.22

 

Il s’est produit, à la fin du XXème siècle, un événement extraordinaire. Il a été reconnu, mais pas assez analysé : la fin de l’Union soviétique et la mue de ses « satellites »[1]. Ou, dans l’ordre exact, la chute de ces régimes périphériques, suivie de celle du Centre. Lire la suite

En janvier 1969, à l’invitation de Jean-Luc Nancy et Philippe Lacoue-Labarthe, j’ai donné une conférence à l’université de Strasbourg, intitulée « Science et scientificité sur l’objet littéraire ». Je n’avais pas encore vingt-trois ans…

On pourra en lire ci-dessous le texte Lire la suite

Une intéressante recension de l’ouvrage Des Verticales dans l’horizon (Labor et Fides, 2018) a paru, sous la signature du professeur Cornelius Crowley, dans les Archives de sciences sociales des religions (n° 188, octobre-décembre 2019, Editions de l’EHESS). Lire la suite

Un atelier-séminaire (ou l’inverse), que j’anime, a lieu depuis ce jeudi 6 janvier, pour proposer une expérience de lecture du « Notre père ».

Les séances se déroulent le jeudi de 19h30 à 21h, aux dates suivantes :

6 et 20 janvier, 3 et 17 février, 10 et 24 mars, 7 et 21 avril.

Pour l’instant, elles se tiennent en visio-conférence, et pour y participer il suffit de demander le lien à l’adresse suivante : 

pasteur@foyerdelame.fr   

Je serais heureux de partager ces moments avec vous, si vous le souhaitez.

Un atelier-séminaire (ou l’inverse), que j’anime, a lieu depuis ce jeudi 6 janvier, pour proposer une expérience de lecture du « Notre père ».

Les séances se déroulent le jeudi de 19h30 à 21h, aux dates suivantes :

6 et 20 janvier, 3 et 17 février, 10 et 24 mars, 7 et 21 avril.

Pour l’instant, elles se tiennent en visio-conférence, et pour y participer il suffit de demander le lien à l’adresse suivante : 

pasteur@foyerdelame.fr   

Je serais heureux de partager ces moments avec vous, si vous le souhaitez.

 

 

Les représentations de J’attends toujours auront lieu à Ferney-Voltaire du 15 au 19 décembre 2021 (horaires ci-dessous). Le spectacle est fondé sur un échange de lettres entre Diderot et l’actrice-écrivaine Marie-Jeanne Riccoboni. J’ai le grand plaisir d’y être présent comme acteur, en interprétant le rôle de Diderot, aux côtés de la comédienne Anne Durand qui joue Mme Riccoboni. La mise en scène est de Hervé Loichemol.

C’est au Théâtre du Châtelard de Ferney-Voltaire, petite ville et haut lieu de la mémoire du XVIIIème siècle, qui se trouve en France, mais dans la banlieue immédiate de Genève.

La compagnie FOR, productrice du spectacle indique :

Compte tenu de la configuration de l’espace scénique, le nombre de spectateurs est limité à 30. Il est donc fortement recommandé de réserver : +33 (0)6 71 59 38 34 ou administration@fortheatre.fr

15, 16, 17 et 18 décembre 2021 à 20h 30
19 décembre 2021 à 17h
Théâtre Le Châtelard | 28 rue de Meyrin | 01210 Ferney-Voltaire

Production Compagnie FOR | Partenariat leLabo | Soutien Ville de Ferney- Voltaire.

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En outre, la compagnie annonce la table-ronde qui aura lieu le samedi 18, dans le même bâtiment que le théâtre :

Diderot et les paradoxes du spectateur

Table ronde avec Nathalie Kremer, Marc Escola et Martin Rueff
Samedi 18 décembre 2021, 17h30
Médiathèque Le Châtelard | 23 rue de Meyrin | 01210 de Ferney-Voltaire Entrée libre, réservation recommandée : +33 (0)4 57 28 00 38

Dans un livre célèbre (La Place du spectateur, 1990), Michaël Fried soutenait que Diderot faisait dépendre l’effet d’une œuvre de la négation du spectateur, ou plus exactement de la constitution d’un sujet conscient de sa propre absence dans la scène de la représentation. Suffisamment paradoxale pour être constamment débattue, la proposition invitait à penser solidairement les thèses du dramaturge et celles du critique d’art : comment Diderot pense-t-il le rôle du spectateur de théâtre et quel statut donne-t-il au spectateur de peinture ? Comment lui-même rend-il compte de ses propres expériences esthétiques, et quelles leçons en retenir pour la théorie esthétique aujourd’hui ?

Avec Nathalie Kremer, professeure de littérature et d’esthétique à l’Université Sorbonne nouvelle et membre de l’Institut universitaire de France, auteure de Diderot devant Kandinsky (Passages d’encre, 2013) et de Traverser la peinture. Diderot. Baudelaire (Brill, 2018)

Marc Escola, professeur de littérature de l’âge classique et de théorie littéraire à l’Université de Lausanne, auteur de Le Cinéma des Lumières. Diderot, Deleuze, Eisenstein (à paraître Mimésis, janvier 2022)

et Martin Rueff, professeur de littérature à l’Université de Genève, poète et traducteur.

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Les répétitions du spectacle J’attends toujours ont commencé le 4 octobre à Ferney-Voltaire. Elles ont réuni la comédienne Anne Durand et moi-même, sous la direction du metteur en scène Hervé Loichemol, dans la très belle salle de répétitions de l’ensemble Le Labo, à Lausanne, et grâce à l’hospitalité de ces lieux créés à l’initiative de Simone Audemars.

Le spectacle se fonde sur l’échange de correspondance de 1757 entre Denis Diderot et la comédienne-écrivaine Marie-Jeanne Riccoboni (1713-1792), augmenté d’un extrait du Salon de 1767, où Diderot commente un portrait de lui-même réalisé par le peintre Michel Van Loo. Hervé Loichemol et Anne Durand me font le grand honneur de m’accueillir pour interpréter le rôle de Diderot, cependant que l’actrice joue le rôle de Mme Riccoboni.

Cette première tranche de répétitions a eu lieu jusqu’au 22 octobre. Elles ont repris à partir du 29 novembre à Ferney-Voltaire, où le spectacle sera présenté du 15 au 19 décembre au Théâtre du Châtelard.

26.05.21

Le philosophe français Lucien Sève est mort le 23 mars 2020, parmi les premières victimes du Covid 19. Il avait 93 ans. Depuis lors, j’ai lu des milliers de pages de son œuvre. Je l’ai à peine croisé de son vivant, mais cette lecture m’occupe presque sans interruption ces derniers mois, de sorte que j’ai l’impression de vivre avec lui une étrange amitié d’après-coup. Pourquoi ?

Je suis sans doute, en premier lieu, attiré par cette œuvre-vie pour la raison même qui en a détourné beaucoup de lecteurs : sa forte inscription dans l’histoire du mouvement communiste. Car Sève a été, non seulement membre « du parti », comme tant d’autres philosophes à une certaine époque, durablement (Desanti, et plus encore Althusser) ou de façon très passagère (Camus, Foucault), mais il en a été un responsable politique et une figure en vue, élu à son Comité central pendant trente-quatre ans. À la différence de nombreuses célébrités du monde des arts ou de la littérature dont les noms ou les signatures servaient de faire-valoir à une politique, il a pris des responsabilités actives au sein de l’appareil et de la vie militante. Et d’ailleurs, ses critiques ultérieures envers la direction du PCF ne se sont pas traduites par un simple éloignement, mais par une implication très active dans la recherche d’une « refondation communiste ». Pourquoi cette immersion m’attire-t-elle vers ses livres ? Parce que c’est une large part de ma propre histoire, bien sûr. Fils d’un communiste convaincu, si je n’ai adhéré au parti que durant quelques années de jeunesse, mon lien affectif et intellectuel avec cet épisode est demeuré très fort. Et, au-delà de mon trajet personnel, j’ai la conviction que la réalité des mouvements socialistes, marxistes, communistes est une part si considérable de la vie des deux derniers siècles qu’elle conditionne profondément notre situation, et que nous sommes loin d’avoir tiré au clair toutes ses implications pour notre présent.

Mais une autre raison vient s’ajouter à celle-ci et s’y mêler de près : elle touche au rapport particulier de Lucien Sève avec ce passé. Dans les années 1950, il est solidaire du contexte stalinien. L’engagement se maintient sans faille visible jusque dans les années quatre-vingt. Mais, dès qu’il commence de manifester des interrogations, puis des désaccords, son évolution s’exprime dans un singulier mixte de critique et de fidélité. Critique à l’égard de l’histoire du mouvement communiste, puis du marxisme comme système d’action et de pensée ; fidélité envers ce qui s’est cherché, parfois trouvé, dans cet immense processus historique et envers la pensée de Marx qui en a été l’aliment. De sorte qu’on ne rencontre chez Sève ni une fixation obstinée sur des faits et dogmes indéfendables, ni un jet à la rivière de l’histoire communiste, incriminant dans Marx et Engels la source empoisonnée de tous les crimes postérieurs. Pour Sève, la critique impitoyable de ce désastre non seulement n’exclut pas, mais requiert un approfondissement de la lecture de Marx, et une réappropriation rénovée de sa « visée » essentielle.

Du coup, son écriture, sans relâcher la rigueur argumentative dont à vrai dire il est un maître, devient au fil des années de plus en plus autobiographique. Il noue avec le biographique un tressage original : d’une part, il en élabore la question comme un de ses thèmes philosophiques de prédilection, qui étend ses recherches sur la personnalité, puis sur la personne [1] ; mais simultanément ses livres se colorent, en certains passages, de récits qui convoquent son histoire personnelle, et son lien aux mouvements de l’époque. Il reste toujours sobre, pudique, et d’une certaine façon, réservé. Mais les récits, quoique circonscrits, prennent de l’importance : ils se multiplient, s’étendent, et surtout jettent les éclairages très vifs sur la réflexion poursuivie avec ténacité.

Cette pratique d’un marxisme critique (il n’aurait pas tout à fait aimé ce terme, ayant pris ses distances avec l’idée de « marxisme ») revêt une portée bien plus large que celle d’une simple situation personnelle originale. Bien sûr, beaucoup d’autres avant lui ont exprimé, dans une lucidité plus précoce, un désir de compréhension de ce qui avait eu lieu, explorant avec Marx les voies d’une analyse radicale des régimes staliniens. Mais ils ont souvent été contraints (le mot est faible) de le faire en dehors des partis communistes. Sève, lui, aura vécu cette tragédie de l’intérieur : d’abord dans un aveuglement dont la construction est à interroger, chez un esprit aussi clair, puis dans une très douloureuse entreprise de transformation éthique, politique et philosophique. Or, c’est cette transformation qui me paraît revêtir une signification très forte. Car la crise du marxisme a donné lieu à des conséquences diverses. D’une part, elle a fait porter sur les œuvres de Marx et de ses continuateurs une multitude de regards critiques salutaires. Ce dessillement général est un acquis irréversible de notre situation morale, et politique, sur lequel on ne reviendra plus. Mais simultanément elle a abouti à déséquiper la critique du capitalisme lui-même. L’analyse reste à faire de ce dessaisissement de tous les outils pour tenter de comprendre comment le capitalisme ravage le monde et, plus encore, comment cela pourrait cesser. Assurément, la déploration devant les dégâts qu’il cause a fortement repris, en particulier depuis les années 2010. Mais, dans les secteurs les plus vastes de l’opinion commune, comme dans de larges pans des débats intellectuels, certains instruments irremplaçables du marxisme – en particulier l’analyse des pouvoirs en termes de classes – en sont venus à faire totalement défaut. Les méfaits du capitalisme sont désormais moins pensés, analysés, qu’on n’incrimine « l’incompétence », les « échecs », la nocivité, la malfaisance des « élites » dirigeantes, en particulier de la « classe politique », sans aucune compréhension des rapports sociaux objectifs qui soutiennent leurs actions. Cela ouvre les voies les plus larges – on le sait maintenant, même si on n’a sans doute pas encore tout vu – aux complotismes, aux populismes par l’invocation permanente « du peuple » ou « des peuples », sans rien dire de leurs structures de classes – c’est-à-dire aux entrées du néofascisme. L’œuvre de Sève est un puissant antidote à ces carences : non par une fidélité fixiste au marxisme d’antan, qui a sombré avec son époque, mais par sa capacité d’analyser les questions concrètes du monde d’aujourd’hui avec des instruments nourris de la lecture de Marx – et sans jamais renoncer à la perspective d’une société sans classes [2].

Reste à se demander comment ma fringale de lecture de cette œuvre, tout entière située dans le sillage de Marx et inscrite dans l’histoire communiste, en est venue à me saisir dans une période où mes réflexions se nourrissent le plus souvent – ce « Journal public » en témoigne sans cesse – de pensées théologiques. Il me faudra tenter de rendre compte de ce paradoxe, si possible sans trop tarder.

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[1] Par ex. Pour une science de la biographie, Éd. Sociales, 2015.

[2] Il y aurait bien d’autres aspects de cette écriture sur laquelle il faudrait revenir : en particulier la veine d’un certain style éthique qui la parcourt de bout en bout – intégrité, dignité, toujours en quête de la dignité et de l’intégrité des expériences humaines. On ne peut pas en dire autant de toutes les œuvres qui l’ont surpassée en notoriété. Ajoutons même que, lorsqu’il lui est arrivé d’y déroger, en se livrant à des attaques indues nourries par les pratiques staliniennes – le fait est rare, mais avéré – il l’a rétrospectivement jugé en termes sévères, sans indulgence à son propre égard et néanmoins sans les délices de la flagellation tardive. Sur ce point, voir par exemple « Regard critique et autocritique sur une polémique de 1981 », dans Commencer par les fins, La nouvelle question communiste, éd. La Dispute 1999, pp. 249-257. J’évoquerai aussi un jour ou l’autre son style, au sens simple du mot, écrit et oral, qui le situe aux côtés des meilleurs praticiens de la langue, de l’ironie, de la formule taillée. De ce style écrit, toute son œuvre témoigne sans défaillance. Quant à l’oral, on peut consulter par exemple les vidéos récentes dont les liens sont donnés sur ce site aux pages que voici : Sève vivant, Une digression, Sève à nouveau. Ainsi, alors que de son vivant, Lucien Sève aura été souvent tenu pour un philosophe respectable, mais de second rang derrière des étoiles de la pensée qui avaient toutes nos faveurs – mais dont l’utilité dans l’abord des questions cruciales d’aujourd’hui me paraît bien incertaine –, j’en viens à penser que son importance, en fait beaucoup plus grande qu’on l’a cru, devra être réévaluée.